lundi 17 octobre 2022

EM. Phosboucraa, revendications et répressions

 

Au Sahara Occidental occupé, aux méthodes de manifestations classiques des ouvriers et retraités du phosphate, la réponse actuelle du colonisateur marocain est tout aussi classique. Ces dernières semaines, pour empêcher toute présence visible dans la rue, le président et des membres la coordination des ouvriers et retraités sahraouis de la société Phosboucraa sont enfermés chez eux, encerclés ou même attaqués par la police marocaine.

Les revendications de l’organisation ne sont pas nouvelles et les manifestations - ou leurs tentatives - ponctuent régulièrement les impasses et la surdité de l’entreprise et des autorités d’occupation.

Le Maroc applique depuis 1976 une politique d’attractivité économique sur le Sahara Occidental qu’il occupe militairement. Cependant, les travailleurs de l’OCP n’en ont bénéficié que depuis une décennie. Ils dénoncent les discriminations qu’ils ont subies, comme le remplacement arbitraire des cadres sahraouis par des colons marocains dès 1976, et réclament le rattrapage des indus ou trop payés, des compensations.

Ainsi, au Sahara Occidental occupé, les congés payés sont d’une durée légale de 54 jours, alors qu’au Maroc ils sont de 30 jours. Néanmoins cela n’est appliqué que depuis 2008 seulement pour les travailleurs de Phosboucraa. Cela fait donc 24 jours de congés annuels à compenser en fonction de l’ancienneté des travailleurs.

D’autre part, les travailleurs en territoire occupés sont exonérés d’impôts sur le revenu, sauf les travailleurs de Phosboucraa qui ont payés des impots jusqu’en 2012. L’organisation estime les trop payés par tous les travailleurs à 320 millions de dirham, soit environ 31 millions d’euros. Ils demandent aussi que cela leur soit remboursé.

Ces revendications sont portées par les Sahraouis qui affirment que le jour où les dus seront payés, ils le seront aussi pour tous les travailleurs marocains qui n’osent pas revendiquer le respect de leurs droits.

Certaines mesures internes à l’OCP comme l’aide à l’acquisition immobilière et la priorité de l’embauche aux enfants des travailleurs, semblent ne s’être appliquées aux travailleurs de Phosbucraa respectivement que partiellement ou pas du tout.

Depuis 2012, l’OCP paye 25% du prix d’achat des maisons des travailleurs, et prend en charge 64% des intérêts du crédit bancaire sil y en a un. Le prix d’une maison est de 850 000 dihram. À ce jour, 84 travailleurs ont déclaré que leur dossier avait été rejeté sans explication, malgré le respect des conditions posées.

Les travailleurs revendiquent le respect de leur droit d’employés, dans un cadre, il faut le rappeler, où le phosphate est extrait de la mine par le Maroc en violation du droit international.

Le droit international affirme que cette activité d’extraction ne peut être légale que si elle a obtenu l’accord des représentants du peuple du territoire, le front Polisario. Ce dernier n’a jamais été d’accord avec l’utilisation des ressources naturelles du Sahara Occidental par le Maroc ou ses partenaires.

Équipe Média, le 13 octobre 2022

El Aaiun, Sahara Occidental occupé

mardi 1 mars 2022

EM. Malgré les murs Sultana Khaya dénonce les projets éoliens de l’occupation


Interrogée par Équipe Média sur les suites de la tentative des militaires marocains de construire un mur pour bloquer la porte de sa maison, Sultana Khaya, militante sahraouie pour l’indépendance du Sahara Occidental à fait une réponse qui atteste de sa détermination et de son grand courage.

« L’interdiction que je vis depuis plus d’un an de sortir de ma maison est anecdotique. C’est la preuve de l’impuissance du Maroc face au droit à la justice que je défends.

Ce qui est important et que j’affirme très clairement c’est que des mesures doivent être prises pour que cesse le pillage des ressources naturelles renouvelables ou non de mon pays, le Sahara Occidental. Les profits servent économiquement et politiquement l’occupation et ses mesures répressives.

À 7 kilomètres de la ville de Bougdour où j’habite, l’occupant marocain construit un parc de 300 MW de production d’énergie avec des éoliennes. Les interlocuteurs sont le gouvernement marocain et non celui du Sahara Occidental. Les constructeurs sont le groupe marocain Nareva Holding, l’entreprise allemande Siemens et l'italien Enel Green Power. La compagnie maritime qui transporte les éléments d’éolienne est la compagnie allemande Briese Schiffahrts.

Ce parc éolien s’installe sans la consultation ni le constamment de notre peuple. Et nous ne sommes pas d’accord.

Les entreprises étrangères sont ici, comme ailleurs au Sahara Occidental, engagées dans un projet qui, en trahissant les vertus écologiques de la production d’énergie à source renouvelable, ne font que compliquer notre accès à l’inéluctable indépendance de notre pays.

Les Européens, plus particulièrement les Français, les Allemands et les Espagnols, doivent respecter les décisions de la justice européenne et internationale, et partir de chez nous.

Le pillage du Sahara Occidental par le Maroc et ses complices doit cesser pour que puisse advenir l’indépendance de notre pays, et se construise notre avenir libre. »

C’est le 21 février 2022 que les forces d'occupation marocaines ont tenté de bloquer la porte d'entrée de la famille Khaya avec du ciment et des parpaings afin de les empêcher de sortir et de protester contre la colonisation.

Le 13 février, informées de la venu de l’organisation marocaine des droits de l’homme la CNDH, les forces militaires avait levé l’encerclement de la maison de Sultana Khaya. Celle-ci vêtue d’une melafa aux couleurs de la République Sahraouie était alors immédiatement sortie avec le drapeau de sa République pour protester contre l’occupation et appeler la population à la rejoindre.

Néanmoins, les forces policières et paramilitaires n’étaient pas loin et les premiers arrivés se sont fait attaqués devant la maison. Cheikh El Hella Khaya, Rabab Khaya, Zainabou Babi, Waana Khaya, Ahmed Bahi, Fatma El Hafidi ont été blessés.

Le 14 février, la délégation du CNDH s’est heurtée au refus de Sultana Khaya de les rencontrer, la militante expliquant qu’elle ne reconnaissait pas la légitimité des instances d’une puissance occupante. Elle avait plutôt scandé depuis la fenêtre de sa maison des slogans pour l'indépendance et la liberté du peuple sahraoui.

Pour rappel, depuis le 19 novembre 2020, Sultana Khaya, sa mère Matou Khaya et sa sœur El Waara sont assignées à résidence, arbitrairement confinées chez elle sans électricité ni eau courante. Seule Matou Khaya, 85 ans, a le droit de sortir pour aller faire les courses sous la surveillance constante des policiers. Les téléphones sont chargés chez les voisins, qui conservent aussi au frais les denrées alimentaires des trois femmes.

Les seules personnes autorisées à les visiter sont leur famille, soit la sœur Salha et frère El Mahfoud.

La maison a été régulièrement envahie par les militaires marocains qui ont alterné les actes de violences sur les femmes et le mobilier (destruction du mobilier, projection de skunk – eau de moufette - sur les murs)

À la résistance des femmes ont répondu harcèlement sexuel (10 mai 2021) et viol d’El Warra (12 mai 2021) et de Sultana (les 5 et 15 novembre 2021). Les 5 et 8 novembre 2021, alors qu’elle se débattait contre la violence des hommes, les forces militaires ont injecté à Sultana une substance qui l’a fait immédiatement perdre conscience.

Équipe Média, le 27 février 2022 - El Aaiun, Sahara Occidental occupé